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Trente-deux bornes ultra-rapides pour recharger sa voiture électrique sur l'A1: les autoroutes françaises comblent leur retard en multipliant les ouvertures de stations, avec des opérateurs de bornes en embuscade.
L'autoroute A1 reliant Paris à Lille est l'une des plus fréquentées d'Europe mais elle était pourtant mal équipée en stations de recharge. Le manque de bornes ultra-rapides mettait notamment en difficulté les touristes hollandais ou belges descendant vers le Sud ou remontant vers chez eux.
Sur l'immense aire de Vémars (Val d'Oise), à quelques kilomètres de l'aéroport de Roissy, Fastned a inauguré lundi sa plus grande station française. Dans chaque sens, sous des "ombrières" jaunes et photovoltaïques, ses bornes de 300 kilowatts promettent une recharge à 80% en une vingtaine de minutes pour une trentaine d'euros environ, selon le modèle de voiture.
L'opérateur de bornes hollandais prévoit d'y accueillir au début une dizaine d'utilisateurs par jour, beaucoup plus le weekend et pendant les vacances, et jusqu'à 1 000 véhicules potentiellement autour de 2030. "C'est le début d'une nouvelle ère pour l'autoroute", a lancé Arnaud Quémard, directeur général du groupe Sanef. Il s'agit de réduire les émissions de CO2 des clients de ces autoroutes du nord de la France, qui atteignent 6,5 millions de tonnes de CO2 par an, soit 1,5% des émissions françaises.
Toutes les aires bientôt équipées ?
Pour s'installer sur cette aire pendant quinze ans, derrière la station-services Shell, Fastned a dû garantir que le nombre de bornes évoluerait avec le trafic, avec des prix "compétitifs", a souligné M. Quémard. Après avoir visité une usine de fabrication de bornes dans le Pas-de-Calais lundi matin, le ministre des Transports Clément Beaune s'est arrêté à Vémars sur le chemin du retour (en DS hybride).
Le gouvernement est en retard sur son objectif de 100 000 bornes et cible les autoroutes. Enedis, qui gère le réseau électrique, a multiplié les chantiers. Toutes les aires des réseaux APRR et AREA sont désormais équipées, comme le demandait la loi fin 2022. La station de Vémars a été construite en cinq semaines à la fin de l'année.
"Nous sommes en mesure d'atteindre avant la fin du semestre toutes les aires d'autoroute de France", a souligné Clément Beaune. Il s'agit de rassurer les automobilistes qui passent à l'électrique et qui voudraient faire de longs trajets, ce que permettent de plus en plus les batteries des nouveaux modèles électriques. Malgré l'augmentation récente des prix de l'électricité, le ministre parie sur une baisse du prix des recharges, avec un coût du kWh divisé par deux d'ici 2030.
Alors que les sociétés d'autoroutes sont critiquées pour leurs tarifs et leurs bénéfices, le ministre a souligné que l'Etat avait encouragé l'investissement dans l'électrique, notamment via des subventions, avant une remise en question du modèle des autoroutes au début des années 2030.
Fastned s'est partagé le réseau autoroutier de Sanef avec ses concurrents TotalEnergies et Ionity (qui rassemble BMW, Ford, Hyundai, Mercedes et Volkswagen). La compétition se joue maintenant sur les routes nationales et à l'entrée des métropoles.
"Il y a un enjeu : trouver du foncier" pour ces remplaçantes des pompes à essence, explique Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France, qui rassemble les industriels du secteur. Il s'agit aussi pour les opérateurs de placer leur marque, comme l'ont fait TotalEnergies ou Shell, avec "un réseau qui tient la route, des avantages", souligne-t-il.
Parallèlement, "les perspectives de rentabilité s'éloignent pour les exploitants", souligne le cabinet Xerfi dans une note publiée début février. Les importants coûts de déploiement et d'exploitation des stations mais aussi l'envolée des prix de l'électricité compliquent le calcul des opérateurs.
Dans ces conditions, atteindre une taille critique est un prérequis pour amortir les coûts de développement du réseau. Des rachats entre opérateurs semblent dès lors "inéluctables": ils profiteront "aux acteurs dotés de moyens financiers conséquents pour acquérir des emplacements stratégiques et supporter d'être déficitaires sur une longue période", relève Xerfi.
Face aux chamboulements de ce secteur, l'Autorité de la concurrence a annoncé vendredi s'autosaisir pour examiner "le fonctionnement concurrentiel du secteur des infrastructures de recharge pour véhicules électriques".