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Une dynamique en perte de vitesse: la réindustrialisation de la France a nettement ralenti en 2024, selon le baromètre industriel de l'Etat dévoilé jeudi, et a même reculé en termes de créations nettes de nouvelles usines pour la première fois depuis la création en 2022 de cet indicateur.
Ce baromètre, élaboré par les services du ministère de l'Economie, a recensé l'an dernier 114 ouvertures de nouvelles usines en France, alors que 119 usines ont fermé, soit un solde net de -5 usines. Si l'on y ajoute les transformations significatives de sites industriels existants (152 "extensions significatives" et 58 "réductions significatives"), le solde total atteint +89 sites, soit moitié moins (-53%) qu'en 2023.
Cette publication s'inscrit dans une séquence industrielle pour le gouvernement: alors que les Etats-Unis de Donald Trump se sont lancés, à coups de droits de douanes, dans une guerre commerciale visant notamment à attirer l'investissement industriel outre-Atlantique, le Premier ministre François Bayrou se rend jeudi en fin de journée au chevet des usines tricolores, au salon Global Industrie à Lyon, accompagné des ministres de l'Industrie Marc Ferracci et du Travail Astrid Panosyan-Bouvet.
Dans le contexte d'un réarmement des pays européens du fait d'un désengagement militaire des Etats-Unis en Ukraine, M. Bayrou y défendra la "souveraineté industrielle" de la France comme la souveraineté "européenne", avant de visiter vendredi un site TGV d'Alstom à La Rochelle, a indiqué son entourage à l'AFP.
Parmi les secteurs porteurs en 2024, on trouve l'industrie verte et notamment les secteurs de l'énergie et de l'économie circulaire mais aussi la santé et l'agroalimentaire, a indiqué le cabinet de M. Ferracci.
A l'inverse, sans surprise, l'automobile a souffert, tout comme les secteurs gourmands en énergie que sont la plasturgie et la mécanique, selon le baromètre.
"La réindustrialisation se poursuit mais connaît un ralentissement", déclare le ministère dans un communiqué.
- Une tendance qui risque de se poursuivre en 2025 -
Le cabinet de M. Ferracci explique ce ralentissement par "une conjoncture qui reste morose en France, mais aussi au niveau européen, voire mondial" et l'instabilité géopolitique, laquelle "génère de l'incertitude" pour les acteurs économiques, susceptible de "ralentir les décisions d'investissement structurantes".
Un coup de frein que confirme un autre baromètre, celui du cabinet Trendeo, pour qui le solde net de créations d'emplois dans l'industrie est resté positif mais a reculé de plus de 60% en 2024, à 31.223 emplois nets, contre 81.637 l'année précédente.
"Cela résulte d'un double mouvement de montée des suppressions d'emplois (+77%, soit 28.000 emplois supprimés en plus) et de baisse des créations (-18%, soit 22.000 créations en moins)", indique cette étude, publiée mardi.
Coût du travail, de l'énergie, fiscalité: Marc Ferracci a évoqué dans une interview à l'hebdomadaire Le Point, plusieurs pistes de travail pour tenter de préserver la réindustrialisation, comme la mise en place de "clauses d'extinction": "concrètement, on dit que certaines normes réglementaires ne sont valables que trois ans. Si l'administration veut les maintenir, elle doit prouver qu'elles sont vraiment efficaces", a-t-il détaillé.
"D'autres indicateurs des services de l'Etat" prévoient pour 2025 "une poursuite de cette tendance" au ralentissement, indique le baromètre.
La France a ainsi connu en 2024 une "augmentation du niveau des défaillances d'entreprises tous secteurs confondus (+13%), en raison d'un rattrapage post-Covid puis de la crise énergétique", comme le souligne une étude de la Direction générale des entreprises (DGE), qui dépend de Bercy.
Le pays a également connu une accélération du nombre de plans de sauvegarde de l'emploi (+34,8%) et une baisse des investissements directs étrangers (-7%).
Un motif d'espoir, toutefois, sur ce dernier point: l'activité industrielle reste "le premier poste de décisions d'investissements" et représente 28% du total, rappelle le ministère.
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