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La France a accéléré en 2023 sa baisse des émissions de gaz à effet de serre, en recul de 4,8% sur un an, a dévoilé mercredi le ministre de la Transition écologique, anticipant la publication du rapport indépendant nécessaire pour analyser cette performance.
Les observateurs devront donc attendre jeudi matin 07H00 la publication des pré-estimations du baromètre annuel du Citepa - l'organisme chargé de réaliser l'inventaire de la pollution carbone française - pour tenter de trancher le débat récurrent entre le satisfecit du gouvernement et les critiques des ONG environnementales.
Ces dernières jugent ces baisses avant tout conjoncturelles (hiver doux, ralentissement économique...) et certaines d'entre elles poursuivent une procédure judiciaire surnommée "l'Affaire du siècle" pour contraindre l'Etat a rattraper le retard accumulé sur la période 2015-2018.
"C'est une année record", s'est félicité mercredi le ministre Christophe Béchu sur TF1, soulignant qu'"en une seule année", il s'agit "quasiment de la totalité de la baisse" enregistrée "en France entre 2012 et 2017".
En 2022, les émissions étaient reparties à la baisse, en repli de 2,7%, après une hausse de 6,4% en 2021 attribuée à l'effet rebond de la reprise économique post-Covid-19.
Au total, l'activité sur le territoire français, sans compter l'empreinte carbone des importations, a ainsi produit environ "385 millions de tonnes de CO2 équivalent" (MtCO2e) en 2023, contre 404 MtCO2e en 2022, a précisé à l'AFP le ministère, sur la base du rapport imminent du Citepa.
L'Allemagne de son côté a émis 673 MtCO2e en 2023, soit 9,8% de moins qu'en 2022, selon le bilan du groupe d'experts Agora Energiewende.
La France, qui émettait 544 MtCO2e en 1990 selon le Citepa, a ainsi baissé ses émissions de 29% environ par rapport à cette année de référence et l'Allemagne, qui part de plus loin, de 46%.
L'objectif fixé par l'Union européenne est d'atteindre une baisse de 55% d'ici à 2030.
- Retour du nucléaire -
Les chiffres annoncés concernent les émissions brutes de la France et non les émissions nettes, une fois prise en compte l'absorption par les puits de carbone comme les forêts ou les tourbières. Ce captage naturel est nettement inférieur aux prévisions de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), le texte qui fixe la trajectoire climatique française.
En juin, le Haut Conseil pour le climat avait estimé que la baisse des émissions françaises était encore "insuffisante" au regard de ses objectifs et des retards accumulés.
"Après avoir doublé la baisse entre 2017 et 2022, on doit à nouveau (la) doubler entre 2022 et 2030", a rappelé M. Béchu.
Pour le ministre, 2023 est "dans les rails du rythme que nous devons tenir jusqu'à la fin de la décennie" mais "ce n'est pas du tout le moment de baisser la garde".
La baisse des émissions "vaut dans tous les secteurs", même si elle est "plus modeste dans les transports", "de l'ordre de 2%", a encore souligné M. Béchu.
"Structurellement, c'est la preuve que la planification écologique, les mesures qui sont engagées commencent à produire des effets", a estimé le ministre.
Il n'y a "pas d'effet météo", a-t-il ajouté, en réponse aux observateurs pour qui la douceur des deux derniers hivers a favorisé une moindre consommation d'énergie et donc de pollution carbone.
Dans le détail, selon le ministère, la baisse est la plus forte dans le secteur de "l'énergie (-14,1%) et plus particulièrement pour la production d'électricité (-29%)", grâce notamment à la production décarbonée du parc nucléaire, qui a repris des couleurs en 2023 après un passage à vide.
La baisse dans l'industrie (-7,8%) est portée par les performances de l'agroalimentaire (-12,3%), de la métallurgie des matériaux ferreux/sidérurgie (-14,1%) et des autres industries manufacturières (-16,6%).
Les émissions des bâtiments résidentiels et tertiaires ont baissé de 6,0% en 2023, le chauffage étant en recul de 7%.
Les chiffres ne sont pas encore connus pour le transport aérien. Ses émissions continuaient d'augmenter fortement sur les neufs premiers mois de 2023: +21% pour les vols intérieurs et +27% pour les vols internationaux, avait indiqué le Citepa en décembre.