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La Banque postale ne fera plus de prêts pour des projets liés aux énergies fossiles à l'horizon 2030 : une première, saluée par les ONG, même si elle est loin d'être la plus exposée à ces industries responsables du réchauffement du climat.
"La Banque postale est (...) la première banque au monde à s'engager pour une sortie totale des secteurs du pétrole et du gaz d'ici 2030", "une étape majeure dans sa stratégie bas carbone", a annoncé l'établissement bancaire français dans un communiqué. Elle avance ainsi son objectif de sortie du gaz et du pétrole de dix ans.
"C'est un excellent signal dans le contexte actuel", salue Lucie Pinson, fondatrice et directrice de l'ONG Reclaim Finance. Cette annonce a lieu à deux semaines de l'ouverture de la COP26, la conférence de l'ONU sur le climat qui doit donner une nouvelle impulsion aux politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Mercredi, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) avait lancé "de sérieux avertissements" et averti que la transition énergétique restait "trop lente". "L'effort demandé à la Banque Postale est bien plus faible que pour BNP ou Crédit Agricole", nuance Mme. Pinson. "Mais on salue très chaleureusement une annonce qui arrive juste après la confirmation de l'AIE des mesures à adopter pour atteindre la neutralité carbone."
L'établissement bancaire n'est en effet pas le plus impliqué dans ces secteurs: le montant total de ses investissements et financements représente 500 millions d'euros dans le charbon et 700 millions d'euros dans le pétrole et le gaz, comparé à des dizaines de milliards ou plus pour les plus grandes banques de la planète.
Néanmoins, l'annonce de la Banque postale en fait le "premier acteur financier français à traduire l'appel de la communauté scientifique et de l'AIE en mesures concrètes pour laisser les pétrole et gaz dans le sol", selon Alix Mazounie, de Reclaim Finance.
Un signal aux acteurs financiers
Concrètement, La Banque postale change sa politique à l'égard des entreprises productrices de pétrole ou de gaz et de celles qui participent au développement d'infrastructures dans ces secteurs. Elle cesse de financer des projets énergétiques basés sur le pétrole ou le gaz, de fournir des services financiers aux entreprises qui mènent ces projets et se désinvestit progressivement de ces entreprises. Pour le charbon, cette évolution était déjà en cours.
"Si [les entreprises] ne sont pas engagées dans un plan de transition qui est crédible, on ne les accompagnera pas", a assuré à l'AFP Philippe Heim, président du directoire de la Banque postale.
L'établissement assure cependant qu'il continuera à soutenir activement et à financer les entreprises énergétiques engagées dans un plan de transition solide et conforme à l'accord de Paris sur le climat, a précisé la banque.
La trajectoire de décarbonation de la Banque postale a été validée par le consortium de référence "Science Based Targets initiative" (SBTi), pilotée par quatre grandes organisations internationales, le CDP (Carbon Disclosure Project), le WRI (World Resources Institute), le Pacte mondial des Nations unies (UNGC) et le Fonds mondial pour la nature (WWF).
Elle est la première banque française et l'une des premières institutions financières au monde à obtenir cette validation, assurance de la rigueur des engagements climatiques, en conformité avec les objectifs de l'accord de Paris pour limiter le réchauffement de la planète.
"Si toutes les banques faisaient un copier-coller de la politique de la Banque postale, le climat serait largement épargné. Malheureusement, pendant ce temps, les soutiens de BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et BPCE au développement de l'industrie pétrogazière sont en roue libre", fustige Alexandre Poidatz, d'Oxfam France. "Ils ont déjà presque doublé leurs financements aux énergies fossiles depuis la COP21", déplore-t-il.