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Les véhicules à hydrogène retardent la transition énergétique et ne devraient pas être promus par Toyota pendant les Jeux olympiques de Paris, affirment une centaine de scientifiques dans une lettre ouverte publiée mardi.
500 Toyota Mirai dans la flotte officielle
Cinq cents Toyota Mirai, la seule berline du marché équipée d'une pile à combustible, doivent intégrer la flotte officielle de l'événement sportif, avant d'être reconverties en taxi à l'issue des Jeux. Une dizaine de bus doivent aussi transporter les athlètes.
"La promotion d'une voiture à hydrogène est scientifiquement en contradiction avec les objectifs d'émissions de CO2" mondiaux et va "endommager l'image des Jeux", préviennent les signataires de cette lettre ouverte envoyée au Comité international olympique et consultée par l'AFP.
Toyota a répondu mardi que l'hydrogène jouerait un "rôle clé parmi les différentes technologies de décarbonation", soulignant que cette opinion était "partagée par la Commission européenne".
Le groupe japonais compte présenter pendant les Jeux dix applications de l'hydrogène, dont ces véhicules qui offrent "une large autonomie et une recharge rapide".
1 150 voitures électriques transporteront aussi des passagers pendant les Jeux... En tout, la flotte de la marque, 100% électrifiée (entre véhicules hybrides, électriques et à hydrogène) provoquerait 50% d'émissions en moins que lors des différents Jeux précédents, affirme Toyota.
"Toyota promeut l'hydrogène depuis longtemps, mais ils cherchent seulement à retarder la transition vers les véhicules électriques", a déclaré à l'AFP David Cebon, professeur d'ingénierie mécanique à l'université de Cambridge (Royaume-Uni). "C'est une stratégie dilatoire, très cynique de la part d'une des entreprises les plus puissantes du monde".
Hydrogène d'origine renouvelable fourni par Air Liquide
Le n°1 mondial de l'automobile a pris beaucoup de retard dans le développement des voitures électriques, leur préférant des modèles hybrides, plus polyvalents, et où il est pionnier. C'est aussi une des seules marques au monde, avec BMW et Hyundai, à travailler sur l'hydrogène, apprécié pour l'autonomie et la recharge rapide qu'il offre aux véhicules.
Pour ces scientifiques, qui s'appuient sur les travaux du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), les véhicules électriques représentent pourtant la "façon la plus efficace de décarboner le transport".
Les véhicules à hydrogène "vert" (extrait à partir d'électricité renouvelable) demandent trois fois plus d'énergie que des véhicules électriques équivalents, et donc plus d'infrastructures comme des éoliennes et des panneaux solaires, et sont trois fois plus chers à l'usage, assurent ces scientifiques.
De plus, l'hydrogène vert reste rare: le gaz est principalement produit pour le moment à base d'énergies fossiles (pour l'industrie des fertilisants notamment) et émet presque autant de CO2 chaque année que l'aviation mondiale, selon la Coalition pour la science sur l'hydrogène, dont fait partie M. Cebon. Ce groupe estime que l'hydrogène ne peut jouer qu'un rôle mineur dans la transition énergétique d'ici à 2050.
Les signataires demandent à Toyota de remplacer ses véhicules olympiques par des véhicules électriques ou, à défaut, de ne pas en faire la promotion, a indiqué David Cebon.
Le constructeur a souligné que sa stratégie était "multiénergies", considérant qu'une seule technologie "ne peut pas répondre à toutes les situations".
Toyota a confirmé que les voitures olympiques seraient avitaillées en hydrogène d'origine renouvelable par Air Liquide, autre partenaire des JO.