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Le gaz naturel liquéfié (GNL) connaît un fort développement dans le monde, qui ne se dément pas malgré la crise. Les industriels mettent en avant ses avantages du point de vue climatique, qui sont loin de convaincre les défenseurs de l'environnement.
"C'est avec les renouvelables la seule source d'énergie qui a augmenté malgré la crise de 2020", souligne Jean-Baptiste Dubreuil, de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Le GNL a ainsi connu une croissance de 1 à 2% l'an dernier, quand le pétrole chutait de 9% et le charbon de 4% avec la crise sanitaire et économique.
Ce gaz refroidi à - 163 degrés peut être facilement acheminé par bateau au plus près des lieux de consommation. Pratique et relativement bon marché, il a connu un essor très important.
"Le marché du GNL sur les 20 dernières années a évolué de façon très notable : beaucoup plus globalisé avec un nombre d'acteurs beaucoup plus important et des profils d'acheteurs et de vendeurs qui se sont très largement diversifiés", souligne Jean-Baptiste Dubreuil, qui s'exprimait lors de la convention annuelle de l'Association française du gaz (AFG). Près de 45 pays comptent ainsi aujourd'hui des capacités d'importation de GNL, dernièrement la Birmanie, le Ghana ou encore le Sénégal.
Les professionnels du secteur mettent volontiers en avant ses avantages du point de vue climatique. "Il représente un vecteur de transition désormais incontournable", estime Patrick Corbin, le président de l'AFG. "Beaucoup de pays utilisent le charbon comme énergie principale pour produire de l'électricité. C'est clairement un des enjeux majeurs de pays comme la Chine ou l'Inde : la question centrale est à quel moment se fera le switch entre le charbon et le gaz", estime-t-il.
Le gaz émet en effet beaucoup moins de CO2 (jusqu'à près de 50%) que le charbon et moins de polluants. Il remplace aussi de ce point de vue avantageusement le fioul lourd dans le transport maritime. "Aujourd'hui 13% de la flotte mondiale commandée en 2020 est à propulsion GNL", se félicite Patrick Corbin.
Une solution « absurde »
Les arguments des industriels sont toutefois critiqués de longue date par certain défenseurs de l'environnement, qui veulent prendre en compte toute la chaîne de production et pas seulement le bilan de la combustion. "Le GNL est très intensif en termes énergétiques", souligne Anna-Lena Rebaud de l'association des Amis de la Terre, insistant sur un processus de liquéfaction énergivore et une très longue chaîne logistique.
"Des fuites de méthane se produisent aussi bien lors de la production que du transport et du stockage du gaz", ajoute-t-elle. Or le méthane a un pouvoir réchauffant 86 fois supérieur à celui du CO2 sur vingt ans. "Remplacer aujourd'hui une énergie fossile par une autre est aussi absurde d'un point de vue écologique qu'économique", dénonce-t-elle.
"Le GNL, le gaz naturel plus généralement, est sous surveillance, c'est le cas en Europe, ou parfois décrié comme restant évidemment une énergie fossile", reconnaît Thomas Maurisse du groupe français Total, devenu le numéro 2 mondial du GNL derrière Shell. "Le rôle de l'industrie est clairement de prendre à bras le corps le sujet", estime-t-il.
Parmi les pistes : le biométhane liquide (BioGNL), la limitation des émissions dans le processus de production et de transport, la vente de GNL dit "neutre en carbone" sur la base de compensations carbone... Ce dernier concept restant fortement critiqué par des experts et des ONG.
Quel sera l'avenir du GNL ? L'AIE a élaboré plusieurs scénarios, qui se fondent soit sur une poursuite des politiques actuelles soit sur des mesures beaucoup plus volontaristes pour respecter les accords de Paris sur le climat. Dans ce dernier cas, l'AIE prévoit "une croissance beaucoup plus faible et un plateau atteint vers 2035-2040", indique Jean-Baptiste Dubreuil.