Faire de l'acier sans CO2, le choix d'ArcelorMittal présenté dans la rue à Dunkerque

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"Je suis surpris de découvrir qu'ArcelorMittal va remplacer le charbon pour fabriquer de l'acier, je pensais qu'il n'y en avait plus depuis longtemps" : à l'entrée du centre commercial, certains passants jettent un œil distrait sur les affiches. Alain Devigne s'attarde. Il veut comprendre.

En ce jour de fin janvier, dans une galerie commerciale du centre-ville, le deuxième sidérurgiste mondial a installé de grands panneaux présentant son vaste "projet de production d'acier à basse émission de CO2 sur le site de Dunkerque".

Remplacer le charbon par du gaz naturel, puis par de l'hydrogène, pour réduire et fondre le minerai de fer, construire des fours électriques, capturer et stocker le CO2 excédentaire: en pleine période du populaire carnaval de Dunkerque, il n'est pas facile de capter l'attention du public autour des méga-projets d'infrastructure du plus grand site sidérurgique d'Europe.

Mais dans cette ville portuaire qui détient le record du CO2 en France avec 21% des émissions industrielles du pays, industrie, climat et environnement ont partie liée depuis longtemps. "La mauvaise presse des industries ici ce sont les nuages rouges, les fumées, les nuisances, je les vois de mon balcon. Alors, réduire le CO2, c'est une bonne chose si Arcelor s'attaque enfin au problème", s'exclame Maurice VandeWeghe, retraité.

Pour cette concertation, placée sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP), des salariés d'ArcelorMittal et des deux gestionnaires des réseaux de gaz et d'électricité, GRT Gaz et RTE, vont à la rencontre des habitants pour leur expliquer le projet qui va s'étaler sur plusieurs décennies.

« Plus que menacée »

Le sidérurgiste qui exploite trois haut fourneaux à Dunkerque envisage d'y investir 1,4 milliard d'euros pour produire de l'acier sans émettre de CO2 d'ici 2050. Avec une première étape en 2030: les émissions devront avoir baissé de 40% par rapport à 2018.

"Il n'y a jamais eu un investissement aussi fort depuis la création de l'usine" résume Jean-Michel Stievenard, ancien maire de Valenciennes et l'un des deux garants de la sincérité du débat pour la CNDP. "En réunion publique, les gens comprennent que si on n'investit pas, la vie du site est plus que menacée à très court terme" face à la concurrence des pays qui veulent développer une industrie verte, ajoute Thibault Maugenest, un des salariés qui engage la conversation dans la galerie marchande.

Mais comment faire pour y arriver ? Quelles nuisances ? Quels risques ? Les questions se bousculent. Alain Devigne, technico-commercial dans le domaine des équipements de dépollution, se dit "très intéressé" par le sujet, qui rejoint ses propres préoccupations.

"Ca fait des années que je vois des gouvernements successifs ne rien faire sur le sujet du climat, heureusement que le privé s'y met" affirme-t-il, sans savoir que l'État a promis depuis un an son soutien financier à l'opération, et n'attend plus que le feu vert de Bruxelles.

« Où trouver l'électricité ? »

Si le projet arrive à terme, il ne devrait plus rester en 2027 qu'un seul des hauts fourneaux au charbon en activité, qui assurera 40% de la production d'acier, aux côtés d'une unité de réduction directe (DRI) à base de gaz naturel et de deux fours électriques, qui assureront les 60% restant, explique M. Maugenest.

Un peu plus loin, Claire Crockey, étudiante en lettres modernes âgée de 20 ans, qui traverse la galerie commerciale, s'inquiète des volumes gigantesques d'électricité nécessaires pour mener à bien cette transition industrielle.

"À la fac, beaucoup de pièces ne sont pas chauffées, on nous dit de restreindre nos consommations, où vont-ils trouver toute l'électricité nécessaire?" dit-elle, non loin d'un panneau indiquant que le groupe prévoit de se raccorder en 2030 à un réseau électrique à 400 000 volts au lieu des 225 000 volts actuels.

Aucun des interlocuteurs ne lui répond vraiment. Le projet de construction de deux EPR nucléaires par EDF à Gravelines, voisine de Dunkerque, n'est pas évoqué. Ils sont prévus au plus tôt pour 2039. Mais les remarques de la jeune fille et d'autres sont consignées. "ArcelorMittal devra répondre", souligne M. Stievenard.

Ce gigantesque projet "génère des contradictions intéressantes" relève-t-il. "Il est vertueux, mais il exige beaucoup d'énergie, de gaz et d'électricité, et l'énergie est un autre problème à résoudre par la société". La consultation s'achève le 12 février.

 

Commentaires

APO
Et Oui l'acier d'aujourd'hui est très "riche" en charbon... Et il y a plus de 5 fois plus d'acier dans un MW.h électrique éolien que dans un MW.h électrique Nucléaire... Les volumes d'acier nécessaires aux ENRi sont colossaux, surtout pour l'éolien (encore plus quand il est offshore...). Et c'est sans compter sur le "Back-Up" Gaz très dur à évaluer suivant les pays et la période de l'année... Pas étonnant qu'Arcelor-Mittal ait attendu la confirmation de la paire d'EPR2 à Gravelines-Dunkerque pour annoncer son Choix de modernisation vers du "nettement" moins de CO2. Avec du PV et de l'éolien, ils n'auraient jamais fait ce choix ! Aucune Energie n'est propre !!! Il faut voir les Avantages Couts/Bénéfices à Court, Moyen et Long Terme... En omettant de mettre sur la Table certains critères, on pose mal le problème et on se fait de "fausses" solutions de Long Terme... (Le Nucléaire utilise peu de matériaux au MW.h produit !)
Leygonie
La faiblesse de l'élaboration des politiques industrielles du pouvoir dans ce pays tient surtout à son incapacité à se projeter assez loin dans l'avenir.H2f9A
Jean FLUCHERE
Attention cependant à l'hydrogène. Il y a eu déjà des essais dans le passé qui se sont soldés par des explosions. L'hydrogène n'est pas un gaz anodin.
Régis
Hum.. "Heureusement que le privé s'y met" ??.. C'est oublier d'où vient Arcelor-Mittal ? Du passé..Par Usinor-Sacilor, Arcelor.. Au gré des nationalisation - privatisation - fusion (terme adapté pour l'acier liquide..), perfusion (avec des fonds publics..).. À l'origine de la sidérurgie 'Française', on retrouve les "Barons de l'acier" - dont la Famille Wendel - qui sur la fin (avant la nationalisation en 1981) ont laissé l'outil industriel péricliter (bon vieux principe économique de "la vache à lait" - on n'investit plus, on produit un max (peu importe la qualité du produit) le tout c'est que le cash coule à flot..) avant d'appeler l'état au secours.. Etat qui a investi massivement pour redresser le groupe.. avant de le reprivatiser..(pareil, bon vieux principe du "nationaliser les pertes et privatiser les profits..).. J'ai en mémoire Francis Mer (l'ancien ministre qui a été président du groupe) déclarant (enthousiaste) qu'"Arcelor allait devenir le leader mondial de l'acier".. Sauf que le groupe s'est fait avaler tout cru par Mittal, et qu'il ne l'a pas vu venir.. Le même Mittal qui 'pilote' son groupe au gré des subventions - et divers aménagements fiscaux - que proposent les pays dans lesquels ses usines sont installées, avec fermeture à la clef pour les "moins-disant".. Pour ce qui est de "l'acier électrique", ça fait belle lurette que c'est dans les cartons à Dunkerque.. le "frein" principal étant comme d'habitude le ratio investissement / bénéfice.. Donc ça se fera dans la mesure où les subventions (européennes, françaises (de l'état, en passant par la région, etc.) y seront. De même pour ce qui concerne les "électrons" - à pas cher - comme souligné dans l'article (si EPR2 confirmé..).. L'air sera certainement plus pur à Dunkerque dans quelques années (..sous réserve qu'avec le réchauffement climatique et la montée des eaux, il ne se purifie pas avant.. l'usine étant "les pieds dans l'eau, sur la plage")...

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