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Report de la baisse du nucléaire, énergies renouvelables et réduction des consommations, le gouvernement a publié vendredi le détail de la feuille de route énergétique de la France métropolitaine continentale à horizon 2028, lançant une longue phase de consultations avant l'adoption d'un texte final.
Après avoir dévoilé fin novembre les grandes lignes de sa politique énergétique pour les dix prochaines années, le gouvernement a mis en ligne un document de près de 400 pages qui détaille ses ambitions. Cette feuille de route "porte le projet de mener à bien la transition vers un système énergétique plus efficace et plus sobre, plus diversifié et donc plus résilient", a défendu le ministère de la Transition écologique dans un communiqué.
Ce projet de programmation plurianuelle de l'énergie (PPE) doit désormais être soumis à de nombreuses instances (comme l'Autorité environnementale) et à un nouvel avis du public avant que ses orientations ne soient gravées dans le marbre d'un décret. Ces consultations ne devraient pas modifier les grandes lignes du texte, mais il peut toujours y avoir des évolutions à la marge, indique-t-on au ministère.
La PPE est l'un des instruments de mise en oeuvre de la loi de transition énergétique de 2015, qui prévoit notamment une baisse des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation d'énergie ainsi qu'un développement des énergies renouvelables au détriment du nucléaire. La loi va toutefois devoir être modifiée avant l'adoption de la PPE pour tenir compte de quelques changements majeurs. La France repousse en effet de 2025 à 2035 son objectif d'abaisser à 50% la part du nucléaire dans la production d'électricité. L'horizon précédent était jugé "irréaliste" par le gouvernement.
Ayant opté pour une voie de compromis entre les partisans d'une baisse rapide et la volonté de ménager EDF, la feuille de route confirme les annonces d'Emmanuel Macron fin novembre avec la fermeture de 14 réacteurs nucléaires (sur 58) d'ici 2035. Sur le calendrier de cette PPE, les deux réacteurs de Fessenheim doivent fermer en 2020, puis deux autres en 2027 et 2028. Deux autres pourraient aussi être arrêtés en 2025-26 mais seulement si un certain nombre de critères sont respectés. La décision devra être prise quelques années avant.
À plus court terme, les quatre centrales à charbon encore en fonctionnement seront fermées d'ici 2022. Le texte vise les centrales fonctionnant "exclusivement au charbon", laissant la porte ouverte à des projets de reconversion intégrant de la biomasse. Ce dernier point inquiète les ONG de défense de l'environnement, par ailleurs très critiques sur plusieurs aspects du texte. "Les reculs ne concernent pas seulement l'objectif de 50% de nucléaire mais aussi celui sur la baisse de la consommation d'énergie", regrette Morgane Creach, directrice du Réseau Action Climat.
Appels d'offres éoliens et solaires
En parallèle, le texte dévoilé vendredi détaille le rythme de développement des énergies renouvelables avec des appels d'offres réguliers, en particulier dans le solaire et l'éolien terrestre. Les ambitions sur l'éolien en mer, déjà critiquées par les industriels du secteur, restent prudentes. Le gouvernement veut en effet privilégier les technologies les moins coûteuses, alors que les énergies renouvelables sont encore largement soutenues financièrement par l'Etat.
Le mouvement des "gilets jaunes" est aussi passé par là, avec l'abandon de la hausse de la taxe carbone cette année, et une attention particulière aux coûts pour le contribuable de la transition énergétique. La feuille de route indique toutefois qu'une "nouvelle trajectoire" pour la taxe carbone devra être fixée à l'issue du Grand débat national.
Par ailleurs, le texte entérine le retard pris ces dernières années par la France pour réduire sa consommation d'énergie. Alors que la loi de 2015 visait un recul de 20% d'ici 2030, le gouvernement ne table plus que sur une baisse de 17%. En cause notamment, le retard pris dans les transports et le bâtiment.
À l'inverse, les énergies fossiles devraient reculer plus vite qu'escompté. Toutefois, les ambitions sur le biogaz ont été revues un peu à la baisse, à 7% de la consommation de gaz en 2030 au lieu de 10% prévu dans la loi sur la transition énergétique. Le gestionnaire du réseau de transport GRTgaz a ainsi exprimé ses "inquiétudes pour le développement de la filière biométhane en France". De leur côté quatre organisations l'Association française du gaz (AFG), l'Association française du gaz naturel pour véhicules (AFGNV), Coénove (énergies nouvelles) et France gaz renouvelables estimaient que les mesures annoncées "risquent de condamner l'avenir de cette filière sans tenir compte de ses avantages".