Dans les Vosges, Fives carbure pour développer la liquéfaction d'hydrogène

  • AFP
  • parue le

Du très froid et du très lourd : dans les Vosges, des ouvriers mettent les bouchées doubles pour assembler des machines, vendues dans le monde entier, qui refroidissent l'hydrogène afin de le transporter plus facilement.

Liquéfaction de l'hydrogène à - 253°C

L'hydrogène, l'élément le plus répandu dans l'univers, est considéré comme le gaz du futur, à condition qu'il soit produit de façon décarbonée. De lui dépend en partie l'avenir des mobilités.

Les échangeurs de chaleur produits à Golbey, en banlieue d'Epinal, permettent la liquéfaction de l'hydrogène à très basse température (cryogénie). Ces monstres, qui peuvent peser 20 tonnes, sont construits par Fives Cryo, branche cryogénie du groupe d'ingénierie français Fives.

Construits en aluminium en raison de sa conductivité thermique et de sa résistance aux températures très basses, ils permettent de liquéfier l'hydrogène, ce qui facilite son transport, explique à l'AFP Mickaël Grivel, son président, dans les allées de l'usine de Golbey.

Pour cela, il faut descendre à -253 degrés. Et la pression doit être importante, jusqu'à 450 bars, ce qui ne peut être réalisé que dans des échangeurs aux soudures impeccables. Ceux-ci sont parfois intégrés dans des boîtes froides, d'imposants cubes remplis d'échangeurs reliés entre eux par des tuyaux. Elles pèsent entre 100 et 150 tonnes. "C'est un beau labyrinthe", résume Vincent Pourailly, président de l'activité Energy Cryogenics de Fives.

Avions à l'hydrogène

Fives conçoit et fournit des machines, des équipements et des lignes de production pour les plus grands industriels mondiaux. Sa branche cryogénie, leader avec "près de la moitié du marché mondial", fabrique des échangeurs de chaleur à Golbey depuis 1959.

Mais pour répondre au défi de l'hydrogène, elle a investi dans un vaste programme de recherche pour "développer une mobilité décarbonée grâce à l'hydrogène liquide", représentant un financement total de 7,5 millions d'euros (dont 3,4 millions financés par l'Ademe, l'agence de la transition écologique), lancé au printemps.

Ce programme, baptisé HyGen, doit "permettre de répondre à la demande croissante du marché de l'hydrogène, qui induira de passer à de l'hydrogène liquide" pour que demain "des avions volent avec de l'hydrogène, les camions ou les trains roulent aussi avec", selon Vincent Pourailly.

De nombreux échangeurs pour la liquéfaction de ce gaz, perfectionnés, devraient donc continuer à être conçus dans les Vosges. La production d'hydrogène dans le monde doit doubler entre 2024 et 2030, selon des estimations.

Et la part d'hydrogène liquide, infime, de l'ordre d'un million de tonnes, selon M. Pourailly, devrait atteindre trois millions de tonnes en 2030, raison pour laquelle des équipements pour sa production doivent être livrés "rapidement" chez les clients de Fives.

Au total, 300 à 400 échangeurs par an sortent de l'usine de Golbey, ainsi que des boîtes froides. Ils peuvent aller directement chez le client, ou bien en Chine, où Fives Cryo dispose d'une antenne.

École de soudure

Avec quelque 350 employés sur son site de Golbey, Fives doit aussi trouver la main d'œuvre nécessaire à son développement.

Beaucoup de compétences sont nécessaires, pour M. Grivel : dans les métiers de la soudure mais aussi la mécanique de précision. Les échangeurs sont notamment soumis à des tests pneumatiques, ou à l'hélium, pour tester leur résistance et leur étanchéité. Cette contrainte étant très forte pour les échangeurs à hydrogène.

C'est par une école à destination des soudeurs, installée dans un box fermé dans l'usine, que Fives Cryo forme une quinzaine de personnes par an, souvent en reconversion.

Présent dans 25 pays, avec près de 9 000 collaborateurs, Fives a réalisé en 2023 un chiffre d'affaires de près de 2,4 milliards d'euros et affichait début 2024 un carnet de commandes "record".

Ses actionnaires sont les fonds de pension canadiens CDPQ et PSP, le fonds d'investissement français Ardian ainsi que des dirigeants de l'entreprise. La banque publique d'investissement BPIFrance a annoncé en mars son entrée au capital du groupe.

Ajouter un commentaire

Suggestion de lecture