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Les céréaliers français, qui ont déjà subi depuis un an un triplement du prix des engrais, se sont inquiétés jeudi de la disponibilité de ces intrants, constatant déjà des "rationnements" sur le marché européen.
Jamais les engrais de synthèse n'ont été aussi chers : depuis 2020, le prix de l'azote (N), qui favorise la croissance des tiges et feuilles, a augmenté de 80%, celui du phosphore (P), qui aide à l'enracinement, de 36% et celui de la potasse (K), qui renforce la résistance aux maladies, de 22%, a souligné l'Association générale des producteurs de blé et autres céréales (AGPB) lors d'une conférence de presse à Paris.
Si les revenus des céréaliers augmentent en 2022, portés par des hausses historiques des cours du blé avec la guerre en Ukraine, les producteurs ne savent pas si les cours resteront hauts l'an prochain; ils redoutent "un effet ciseau" dévastateur en 2023 si "la courbe des prix des engrais croise celle des céréales". "On verrait une explosion des coûts de production sans compensation par les ventes", relève Eric Thirouin, le président de l'AGPB.
La difficulté est double: d'une part, les exploitants hésitent à acheter de l'engrais à des prix si élevés pour "se couvrir" avant les premiers semis de printemps, ce qui explique un retard de "deux mois" sur le calendrier des achats; d'autre part, quand ils se décident à acheter, ils sont confrontés à "une offre insuffisante".
"On voit un rationnement à 1 000 tonnes pour une commande de 10 000 tonnes. En ce moment, quand on commande 1 000 tonnes, on n'a que 150. C'est un vrai sujet d'inquiétude pour nous", a expliqué Cédric Benoist, secrétaire général adjoint de l'AGPB.
Cette pénurie d'engrais est directement liée au prix du gaz, à partir duquel il est fabriqué et dont la Russie est un gros pourvoyeur. Dès la fin août, en Pologne, Italie, Hongrie et Norvège, de nombreuses usines d'ammoniac, servant à fabriquer les engrais azotés, ont annoncé un arrêt d'activité. Le prix du gaz devient tellement élevé qu'il n'est plus rentable de fabriquer de l'ammoniac.
L'AGPB estime que "les volumes d'engrais disponibles au printemps seront probablement insuffisants", ce qui aurait un impact sur "les choix de cultures, la qualité et le volume" des futures récoltes.