Ce que l'UE défendra à la COP28 au sujet des combustibles fossiles...

  • AFP
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L'UE défendra à la COP28 l'élimination des combustibles fossiles brûlés sans captage du CO2, avec un pic de leur consommation mondiale dès "cette décennie", selon la position commune des Vingt-Sept adoptée lundi. Les Européens appelleront par ailleurs à éliminer "aussi tôt que possible" les subventions aux combustibles fossiles qui ne servent pas à combattre la pauvreté énergétique ou à assurer "une transition juste" - mais sans fixer de date-butoir comme l'espéraient les ONG.

"La transition vers une économie climatiquement neutre exigera l'élimination à l'échelle mondiale des combustibles fossiles unabated", c'est-à-dire brûlés sans captage ou stockage du CO2, a résumé le Conseil européen, à l'issue d'une réunion des ministres de l'Environnement de l'UE.

Dans le même temps, les Vingt-Sept prôneront "un secteur énergétique (qui soit) de façon prédominante sans combustibles fossiles bien avant 2050" - formule exprimée cette fois sans la mention "unabated".

Les ministres de l'UE, réunis à Luxembourg, se sont âprement affrontés sur l'inclusion de ce mot controversé dans le mandat de négociation donné au nouveau commissaire européen au Climat, le Néerlandais Wopke Hoekstra, qui les représentera lors de la COP28, conférence des Nations unies sur le climat prévue du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï.

À l'unisson des ONG, une partie des pays souhaitait retirer l'adjectif "unabated" ou l'assortir de restrictions sur l'usage des technologies de captage du carbone, de crainte que cela ne serve de prétexte pour continuer à brûler des fossiles et offre une échappatoire au secteur pétro-gazier.

"Nous aurons besoin de ces technologies dans les secteurs où les émissions dans la production sont inévitables, comme le ciment (...) Mais il n'y a pas d'alternative à l'abandon progressif des fossiles, cela doit être clair", avait averti la ministre autrichienne Leonore Gewessler. "Ces technologies sont intéressantes, mais ne peuvent seules prendre en charge l'essentiel des émissions : il faut les réserver (aux secteurs) qu'on ne sait pas décarboner autrement", abondait son homologue française Agnès Pannier-Runacher.

Finalement, l'adjectif a été conservé dans le texte, mais n'est plus mentionné dans la formulation de l'objectif de long terme d'un "système énergétique" majoritairement sans fossiles "bien avant 2050".

Dans l'immédiat, les technologies de captage du CO2 seront nécessaires mais "devront être réservées aux secteurs pour lesquels il est difficile de se sevrer des fossiles pour une partie du processus industriel", a expliqué après la réunion la ministre espagnole Teresa Ribera, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE. "L'objectif à long terme reste que les fossiles soient progressivement éliminés du mix énergétique", a-t-elle insisté.

Beaucoup de pays pousseront à la COP28 pour décrocher un engagement inédit de l'humanité à sortir des énergies fossiles "unabated". Ce sera cependant "extrêmement difficile", prévoit Wopke Hoekstra. "C'est une équation à plus de 190 entités, mais il n'y a pas d'autre choix", a-t-il estimé.

« Moteur de changement »

Les Européens appellent par ailleurs à viser une production d'électricité "entièrement ou très majoritairement décarbonée" à l'échelle mondiale à partir "des années 2030". Autres engagements portés par l'UE : un triplement d'ici 2030 des capacités installées d'énergies renouvelables, ainsi qu'un doublement de l'efficacité énergétique, en ligne avec la feuille de route du président de la COP28.

Un autre sujet faisait débat : les Européens devaient-ils maintenir à Dubaï leur objectif, juridiquement acté, d'une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre dans l'UE d'ici 2030 par rapport à 1990, ou défendre la baisse de 57% qu'ils devraient de facto atteindre compte tenu des politiques vertes déjà adoptées ? "57%, ce serait une excellente annonce, nous démontrerions clairement que l'Europe est leader" sur l'action climatique, estimait le vice-président de la Commission, Maros Sefcovic.

Au bout du compte, les Vingt-Sept ont simplement actualisé leur "contribution" pour indiquer qu'ils visaient une baisse d'"au moins 55%" d'ici 2030. "Nous insistons sur l'effet des mesures adoptées, le message étant que nous dépasserons l'objectif fixé", a souligné Teresa Ribera, estimant que l'UE, par son exemple, pouvait s'imposer "en moteur de changement".

Enfin, les Vingt-Sept appelleront à "renforcer les dispositifs de financement" pour le fonds pertes et dommages, créé à la COP27 et destiné à aider les pays pauvres : la COP28 s'efforcera de parvenir à un accord sur son fonctionnement. Les Européens pointent "le potentiel des banques multilatérales de développement et institutions financières internationales" et appellent à "mobiliser toutes les sources de financement".

Wopke Hoekstra avait précédemment plaidé pour chercher des ressources propres susceptibles d'abonder, évoquant des taxes internationales sur le kérosène ou le transport maritime, ou encore les recettes du marché du carbone.

Commentaires

BEE
l'UE pense devoir défendre la position de "stop aux fossiles" croyant que tout le monde peut l'adopter. Eh bien les 2/3 de la planète ne le peuvent simplement pas. La cuisson à l'électricité est accessible à tous dans l'UE, mais pas en Afrique, où il n'y a pas les revenus capables de payer la cuisson à l'électricité, et c'est pour cela que 84% de la cuisson est au bois/charbon de bois, 15% au gaz en bouteille et 1% à l'électricité. En Amérique Latine, c'est environ 93% au gaz en bouteille, l'électricité étant hors de prix. La position de l'UE (anti gaz en bouteille) obligerait l'Afrique à consommer davantage de bois/charbon, sachant que la population va doubler d'ici 2050. On imagine la pression sur la foret, qui n'est pas une énergie renouvelable (renouvelable, selon l'UNFCC, est une énergie qui se renouvelle dans l'année, et non en 40 ans comme c'est le cas pour l'arbre qui est consommé dans l'année). Le tout électrique achoppera sur les capacités de paiement des usagers, et je doute fort que l'UE ait les moyens de tout financer en Afrique, en particulier un prix bas de l'électricité pour l'usager, vu la pauvreté rampante et les déficits financiers dans la population européenne. J'ajoute que personne ne prend en compte comment et par quoi remplacer la pétrochimie si vitale à nos économies mondiales, mais pratiquement irremplaçable à moyen-terme. Ainsi bannir le pétrole et le gaz naturel me parait une position relativement irresponsable, car j'estime que le changement climatique doit être traité après le bien-être des populations et de leur autonomie. Qu'il nous faille trouver des solutions d'indépendance vis à vis des fossiles, me parait plus qu'urgent, mais à la mesure des capacités financières des populations aujourd'hui démunies. En effet personne ne sait comment réellement le climat s'autorégule, il serait assez dangereux de paupériser encore davantage les 2/3 de la planète uniquement pour des raisons de changement climatique. In fine, que l'UE prenne cette position pour elle, mais qu'elle ne l'impose pas aux autres.
Albatros
Alors que tous les gouvernements de l'UE ont couru au Qatar et ailleurs dès que les livraisons de gaz russe ont été interrompues. Quelle hypocrisie ! Quand va-t-on cesser cette panique climatique ? Quand va-t-on réaliser les dommages des politiques climatiques erratiques et inconsidérées dont la conséquence certaine sera l'appauvrissement du plus grand nombre au bénéfice des petits malins du business "vert" (notamment les consultants à la Jancovici et calculateurs de bilans carbone ineptes et a-scientifiques qui n'ont jamais rien produit de leur vie et les producteurs chinois de bagnoles électriques) ? Quand va-t-on cesser ce suicide de moins en moins lent de l'industrie européenne ? Le premier qui propose ne serait-ce qu'un sursaut de lucidité en la matière a mon suffrage (et grand merci de ne pas me traiter de nazi ou de négationniste). Courage à ceux qui produisent et qui sont couverts d'insultes quotidiennement par les grands prêcheurs de l'apocalypse : agriculteurs qui produisent, patrons et ouvriers de l'industrie,
Daphné
Bien dit BEE et Albatros. Les milliards brassés dans les nouvelles énergies ne changent pas la donne. Les investissements se font toujours selon l'ancien système que nous avons de la gestion très centralisée de l'énergie dans une perspective de rentabilisation, de source de retombée régulière d'argent, d'exploitation continue à long terme entretenant de très grosses entreprises. Pour les pays en voie de développement ( euphémisme qu'on ne corrigera plus!) la population est encore essentiellement rurale dispersée, vivant quasiment en autarcie disposant de peu d'argent. Comme le dit BEE l'essentiel de l'énergie en Afrique est le charbon de bois pour cuire et les lampes-tempêtes à pétrole pour s'éclairer... Le coût d'installations centralisées avec réseau est rédhibitoire et impensable ( difficultés d'installation et surtout vol des lignes pour le marché parallèle) une facturation permanente mensuelle impossible. Les énergies renouvelables, décentralisées pour les petites collectivités sont les plus intéressantes , les plus bénéfiques . Des microcrédits bancaires ( banques sociales d'état) pour soutenir les petits projets ainsi que des manufactures pour la production nationale permettraient d'améliorer la qualité et le niveau de vie en court circuitant le système centralisé pollueur du modèle occidentale appliqué malheureusement déjà trop dans les pays en voie de développement.. Tant pour l'énergie que pour les transports.

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