- AFP
- parue le
Le géant pétrolier britannique BP, à la traîne par rapport aux autres majors pétrolières, a vu son bénéfice s'effondrer en 2024 et annoncé mardi une "nouvelle direction", qui pourrait le voir s'éloigner un peu plus de ses ambitions climatiques passées.
Pressions d'investisseurs
BP "a posé en 2024 les bases de (sa) croissance" en remodelant son portefeuille et en réduisant ses coûts et "nous prévoyons désormais de repenser fondamentalement notre stratégie" pour améliorer les retours aux actionnaires, a assuré son directeur général Murray Auchincloss.
"Ce sera une nouvelle direction pour BP", qui sera dévoilée lors d'une journée dédiée aux investisseurs le 26 février, a promis le patron dans un communiqué. BP a publié mardi un bénéfice net part du groupe en chute de 97% en 2024, à 381 millions de dollars, plombé notamment par la baisse des marges de raffinage, des dépréciations d'actifs et des effets comptables défavorables.
L'entreprise est sous pression d'investisseurs activistes, qui plaident pour des changements importants de stratégie : c'est notamment le cas du fonds Bluebell, qui appelle depuis plus d'un an le groupe à revoir à la baisse ses ambitions jugées "irrationnelles" sur les énergies propres.
Lundi, des informations de presse faisant état d'une prise de participation "significative" du fonds d'investissement activiste Elliott Management avaient fait bondir de plus de 7% le titre de BP à la Bourse de Londres.
Le fonds Elliott est connu pour demander des changements stratégiques au sein des groupes dans lesquels il investit. Son arrivée nourrit des spéculations de changements à la tête de BP, d'un transfert de sa cotation aux États-Unis voire d'une scission ou d'un rachat, ce qui dope un cours de Bourse à la traîne par rapport à ses rivaux.
Changement de stratégie après un plan de neutralité carbone en 2020
Mais BP n'a pas attendu pour annoncer des changements: il a dit en décembre vouloir réduire "de manière significative" ses investissements dans les énergies renouvelables, après avoir déjà freiné sur ses objectifs climatiques.
Il s'agit d'un changement de stratégie radical pour l'entreprise, qui s'était distinguée à partir de 2020 par un ambitieux plan de neutralité carbone.
BP, qui a aussi annoncé en janvier des milliers de suppressions de postes, pourrait aller plus loin: les investisseurs spéculent depuis des mois sur un possible abandon imminent de sa promesse de réduire la production de pétrole de 25% d'ici à 2030 par rapport à ses niveaux de 2019.
Le britannique n'est pas le seul à faire machine arrière sur ses objectifs climatiques pour doper sa rentabilité: c'est aussi le cas de son compatriote Shell.
Le français TotalEnergies maintient lui ses objectifs de réduction d'empreinte carbone, mais a annoncé récemment qu'il allait réduire de 500 millions de dollars, de 5 à 4,5 milliards de dollars, la part de ses investissements en 2025 dédiée aux "énergies bas carbone".
Mais BP est le seul à avoir vu une réduction aussi drastique de son bénéfice net parmi les cinq "majors" pétrolières historiques, qui comprennent, outre les trois groupes européens, les américains ExxonMobil et Chevron dont les profits cumulés ont dépassé l'an dernier 80 milliards de dollars.
« BP veut rester maître de son destin »
La production de pétrole et de gaz de BP a augmenté marginalement, de 2%, sur l'ensemble de 2024, mais le bénéfice hors éléments exceptionnels, indicateur le plus suivi par les marchés, a reculé : il a perdu un tiers, à 8,9 milliards de dollars.
"Dos au mur, BP estime qu'il doit continuer à distribuer de l'argent aux actionnaires pour les garder à ses côtés" mais cela risque d'être compliqué par "son endettement important et la nécessité de financer" son changement de stratégie, prévient Russ Mould, analyste chez AJ Bell. "Un plan clair et crédible est absolument nécessaire si BP veut rester maître de son destin", selon lui.
BP, a augmenté son dividende de 10% et racheté 7 milliards de dollars d'actions en 2024. Le groupe fera un rachat d'actions de 1,75 milliard avant la publication des résultats du premier trimestre.
Mais en attendant les annonces stratégiques du 26 février, les actionnaires sont dans l'expectative mardi. Après avoir hésité, le cours de l'action recule de 0,82% à la mi-séance.