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Le Qatar a annoncé dimanche avoir choisi le géant énergétique italien Eni comme deuxième partenaire étranger, après le français TotalEnergies, pour développer le plus grand champ de gaz naturel au monde, quelques jours après que la Russie a réduit ses livraisons à l'Italie.
"J'ai le plaisir aujourd'hui (...) d'annoncer qu'Eni a été choisi comme partenaire dans ce projet stratégique unique" au monde, a déclaré le ministre qatari de l'Énergie et PDG de Qatar Energy (QE), Saad Sherida Al-Kaabi, lors d'une conférence de presse à Doha.
Dans le cadre d'une joint venture avec le géant qatari des hydrocarbures, Eni prend une part d'un peu plus de 3% dans le projet North Field East (NFE,) qui vise à augmenter de 60% la production de gaz naturel liquéfié (GNL) du pays du Golfe d'ici 2027.
La part de TotalEnergies, dont l'accord jusqu'en 2054 avec QE a été annoncé le 12 juin, sera la plus importante à 6,25%, selon son PDG Patrick Pouyanné. Le plus important accord de l'entreprise française avec le Qatar contribuera à compenser son retrait de Russie suite à la guerre en Ukraine.
D'autres signatures doivent être annoncées dans les jours à venir, au terme de discussions entamées en 2019. M. Kaabi a refusé de dévoiler le nombre total de partenaires pour le North Field East, où la participation des sociétés étrangères devrait s'établir à environ 25%.
« Partager les risques de commercialisation »
"Nous avons beaucoup à apprendre de votre leadership, de vos normes et de votre capacité à vous adapter à des circonstances très difficiles", a dit dimanche le PDG d'Eni, s'adressant à son homologue qatari.
Eni avait annoncé vendredi que Gazprom livrerait seulement 50% du gaz demandé par le géant énergétique italien, au lendemain des accusations de "mensonges" lancées par le Premier ministre Mario Draghi contre le géant énergétique russe sur ses réductions des approvisionnements.
Les Américains Exxon Mobil et ConocoPhillips ainsi que le Britannique Shell sont sur les rangs pour participer au projet NFE de plus de 28 milliards de dollars, ont affirmé des sources du secteur à l'AFP. Des médias évoquent également des négociations avec des majors chinoises.
Alors que le Qatar peut assumer seul le coût de ce projet, ces accords permettent de "partager les risques de commercialisation", estime Thierry Bros, professeur à Sciences Po Paris et expert énergies et climat. "Il y a peut-être aussi une vision géopolitique", ajoute-t-il.
Le projet NFE, où la production doit débuter en 2026, prévoit l'expansion du champ offshore North Field, le plus grand gisement de gaz naturel au monde que le Qatar partage avec l'Iran.
« Source d'approvisionnement la moins chère »
Le North Field représente environ 10% des réserves de gaz naturel connues dans le monde, selon QE. Il s'étend sous la mer jusqu'au territoire iranien, où les efforts de la République islamique pour exploiter leur partie de ce gisement sont entravés par les sanctions internationales.
Le Qatar est l'un des principaux producteurs de GNL au monde, avec les États-Unis et l'Australie, et "la source d'approvisionnement la moins chère à l'heure actuelle, ce qui le rend attractif", précise Daniel Toleman, analyste pour le cabinet Wood Mackenzie.
"Ces accords démontrent que l'engagement à long terme des sociétés internationales au Qatar va se concrétiser", poursuit-il.
La Corée du Sud, le Japon et la Chine en sont les principaux clients, l'Europe s'étant longtemps opposée aux accords à long terme souhaités par l'émirat. Mais, suite à la guerre en Ukraine, les importateurs de GNL s'empressent de sécuriser des alternatives au gaz russe. "Nous avons assisté à une augmentation considérable côté américain (...) et, maintenant, on constate que le Qatar est sur la bonne voie", relève M. Toleman.
Une décision finale d'investissement est par ailleurs attendue dans les mois qui viennent sur une autre phase d'expansion, le projet North Field South (NFS).