Les 18 sources lumineuses de l’installation de l’EPFL forment une demi-sphère de près de 2 mètres de diamètre. (©EPFL-Alain Herzog)
Un laboratoire de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dispose d’une installation capable de générer un flux lumineux d’une intensité équivalente à celle de « 21 700 soleils ». Celle-ci permet de réaliser un ensemble de tests en conditions extrêmes. Explications.
Un faisceau lumineux très concentré
Conçue en collaboration avec l’Australian National University et la société Kinoton Digital Solutions, l’installation du Laboratoire de science et technologies des énergies renouvelables de l’EPFL est constituée de 18 sources lumineuses placées en deux cercles concentriques. Chacune des 18 lampes de 2,5 kW est équipée d’une ampoule au xénon (type d’ampoule dont le spectre lumineux est assez proche de la lumière du Soleil) et d’un réflecteur.
Comme leur nom l’indique, les réflecteurs permettent de réfléchir les flux lumineux qui sont concentrés en un point précis. Sur ce point s’exerce une intensité lumineuse extrême, pouvant atteindre jusqu’à 21,7 MW/m2, ce qui correspond à près de 21 700 fois l’irradiation solaire maximale reçue à la surface de la Terre (de l’ordre de 1 000 W/m2)(1).
Pour moduler l’intensité du flux lumineux, les chercheurs peuvent employer une partie ou la totalité des lampes en faisant varier « entre 70% et 120% » l’intensité de 90 A du courant fourni. Le laboratoire précise que la puissance et la concentration du faisceau lumineux sur la cible dépendent du nombre de lampes employés et de l'emplacement de ces lampes (lorsque les lampes du cercle intérieur sont uniquement utilisées, le cône lumineux est plus fin que celui obtenu avec les lampes du cercle extérieur). Les performances de l’installation, qualifiées d’ « inédites » par l’EPFL, sont en grande partie liées à la précision inégalée des réflecteurs, fabriqués par électroformage, c’est-à-dire par dépôt électrolytique de métal.
Des tests sur de nouvelles technologies solaires
Le laboratoire utilise actuellement cette installation pour tester de nouveaux matériaux : « des céramiques, matériaux très résistants à haute température utilisés dans l'industrie et le domaine spatial, et des absorbeurs solaires, matériaux généralement métalliques dont les propriétés de surface ont été travaillées », précise le groupe de recherche, dirigé par Sophia Haussener.
Des travaux portent notamment sur l’amélioration du rendement des centrales solaires thermodynamiques (pour des centrales à tour ou cylindro-paraboliques). « Notre travail se situe à la fois dans une démarche prospective, à savoir développer des approches novatrices : proposer et démontrer des nouvelles géométries de récepteur solaire, de nouvelles voies de conversion de la chaleur en électricité ; et valider à plus long terme des solutions existantes pour faciliter leur intégration aux futures installations : par exemple, prouver la stabilité d’un matériaux en lui faisant subir un vieillissement accéléré en reproduisant des centaines de cycles jour/nuit en quelques jours ».
L’équipe travaille sur de nouveaux concepts de captation, de transfert et de conversion de l’énergie lumineuse à l’aide de cette installation hors normes. Le laboratoire est ainsi particulièrement en pointe sur « la conversion photo-électrochimique », qui consiste à décomposer, à l’aide d’un rayonnement lumineux, l’eau en oxygène et en hydrogène (procédé inspiré de la photosynthèse). Pour rappel, l’hydrogène est aujourd’hui principalement produit par reformage de combustibles fossiles, un procédé économique mais qui s’accompagne d’importantes émissions de CO2.
Développée en « open source », cette installation pourrait faire l’objet d’autres modèles avec des flux lumineux d’une intensité plus grande encore en employant des lampes de plus grande puissance. Notons qu’un modèle similaire existe déjà à Canberra en Australie.
Installation d'un matériau céramique poreux au niveau du point focal de l'installation de l'EPFL (©EPFL-Alain Herzog)