Mine

Déjà à l’origine de la révolution industrielle, le charbon présente également un intérêt pour une autre ressource énergétique présente dans ses pores : le gaz de houille. (©photo)

Définition

Également appelé « gaz de couche » et « gaz de charbon », le gaz de houille désigne le gaz piégé dans des veines de charbon. Ce gaz est composé à près de 95% de méthane et peut être exploité dans des centrales électriques à gaz ou injecté dans des réseaux de distribution de gaz après traitement.

Longtemps considéré comme un danger lors de l’exploitation du charbon dans les mines (« coups de grisou »), il est depuis une trentaine d’années exploité comme une ressource énergétique à part entière, dans un contexte de raréfaction des hydrocarbures. En France, le groupe La Française de l'énergie (ex-European Gas Limited) exploite du gaz de couche en Lorraine (mais aussi du « gaz de mine » qui ne nécessite pas de forage dans les Hauts-de-France).

En France, le terme de « gaz de houille » a longtemps été employé pour désigner le gaz récupéré lors de la transformation de la houille en coke (procédé principalement destiné à fournir du coke au secteur de la sidérurgie). Ce gaz manufacturé a été employé en France comme gaz d’éclairage jusqu’à la fin du XIXe siècle (remplacé par des éclairages électriques) et comme gaz de ville jusqu’en 1950 (remplacé par le gaz naturel).

En anglais, le méthane (mélangé à d’autres gaz) présent dans les bassins houillers est appelé différemment selon les conditions dans lesquelles il est récupéré. On parle de :

  • « coal mine methane » (CMM) lorsqu’il est capté en cours d’exploitation dans les mines ;
  • « abandoned mine methane » (AMM) lorsqu’il s’agit de gaz pompé au sein de mines qui ne sont plus exploitées. On le qualifie plus fréquemment en France de « gaz de mine » dans ce contexte ;
  • « coal bed methane » (CBM) lorsqu’il est récupéré depuis la surface avant le début de l’exploitation d’une mine ou au sein d’un gisement non exploité. Il peut également être qualifié de « enhanced coalbed methane (ECBM) lorsque l’extraction de ce gaz est « stimulée ». En Australie, il est par ailleurs appelé « coal seam gas » (CSG).

C’est cette dernière méthode de récupération qui fait l’objet de cette fiche. Précisons que ces différents intitulés qualifient in finele même gaz que les exploitants de mines qualifient aussi de « grisou ».

​​​​​​​Formation du gaz de houille

Le charbon est créé par la décomposition de matière organique d’origine terrestre (essentiellement ligneuse : bois et autres végétaux), un processus s’étalant sur plusieurs millions d’années.

L’action des micro-organismes amorçant ce processus et la transformation thermique due à l’enfouissement de la matière organique créent du méthane et d’autres gaz dans de plus faibles proportions (CO2, azote, hydrogène, etc.) ainsi que de l’eau. La quantité de gaz produite varie selon les gisements et les conditions de température et de pression.

On estime ainsi que près de 150 à 200 m3 de méthane sont produits par tonne de charbon formée (pression de gaz < 5 MPa). La majorité de ce gaz a aujourd’hui migré hors de la couche de charbon vers la surface et la proportion de gaz de houille restante par tonne de charbon n’excède généralement pas 20 m3.

Le gaz de houille restant dans les couches de charbon est présent sous 3 formes :

  • à l’état libre dans les fractures et les plus gros pores de la roche (au-dessus de 50 nm, 1 nm étant égal à 10-9 m) ;
  • à l’état adsorbé dans les plus petits pores du charbon. C’est sous cette forme que le gaz de houille est le plus abondant (jusqu’à plus de 90% du gaz du gisement). Les molécules de gaz se collent à la surface des grains élémentaires de charbon au sein de ces micropores dont la dimension peut être inférieure à 2 nm ;
  • à l’état dissous dans l’eau contenue au sein du gisement.

Principe d’extraction et techniques employées

Le gaz de houille présent dans des veines de charbon non exploitées peut être pompé depuis la surface.

Une fois un forage réalisé, l’exploitation commence par une phase d’extraction de l’eau de la couche de charbon (appelée « eau de production »). L’extraction fait baisser la pression dans cette couche de charbon jusqu’à atteindre un point de « désorption » du gaz (pression à laquelle le gaz s’échappe des pores de la roche).

Progressivement, la proportion d’eau présente dans le mélange extrait diminue tandis que celle de gaz augmente jusqu’à ce que le fluide extrait soit saturé en gaz (avec une part irréductible d’eau).

Une fois extrait, le gaz est séché et traité avant d’être utilisé comme combustible dans des centrales électriques ou injecté sur les réseaux de distribution.

Utilisation de forages « dirigés »

Les forages utilisés pour l’exploitation du gaz de houille sont aujourd’hui la plupart du temps « horizontaux » (également appelés forages « dirigés »). Cette technique permet au forage, vertical à sa base, de se recourber en suivant la veine de charbon sur plusieurs centaines de mètres. La productivité par puits augmente alors fortement (de 10 à 20 fois par rapport à un forage vertical) et le nombre de puits en surface est réduit.

« Stimulation préalable » de la couche de charbon

Bien que le charbon soit une roche naturellement très fracturée (failles, microfissures, etc.) contrairement aux formations très compactes contenant des gaz de schiste ou de réservoir compact, une « stimulation » peut-être nécessaire pour optimiser le volume de gaz de houille extrait. Cette stimulation de la roche vise à augmenter la désorption du gaz et varie selon la perméabilité des gisements. Elle ne consiste toutefois pas nécessairement en une fracturation hydraulique, procédé interdit en France par la loi en juillet 2011. Tout comme pour l’exploitation de la géothermie profonde, il est possible de stimuler les fractures au sein du gisement de charbon sans chercher à créer de nouvelles fractures dans la roche.

Concrètement, la stimulation de couches de charbon (situées à une profondeur moyenne de 1 000 à 2 000 m) nécessite des pressions d’injection moins fortes que l’exploitation de gaz de schiste (gisements compris entre 2 000 à 4 000 m de profondeur). Cette stimulation peut donc a priori être réalisée à l’eau sans ajout d’agents de soutènement (servant à maintenir les fissures créées ouvertes) ou avec des gaz ou « mousses » émulsifiantes à base d’azote ou de dioxyde de carbone. D’autres techniques alternatives sont à l’étude.

Gisements et production

Le gaz de houille constitue pour plusieurs régions ou pays une ressource susceptible de renforcer la sécurité d’approvisionnement gazier et la compétitivité industrielle.

Il y a 100 000 à 260 000 milliards de m3 de ressources estimées de méthane coincé au sein des veines de charbon dans le monde. Les réserves mondiales prouvées de gaz naturel atteignent un niveau similaire (187 000 milliards de m3 à fin 2012). Le téramètre cube (Tm3) est une unité de mesure de volume souvent employée pour qualifier des ressources ou des réserves. Un téramètre cube équivaut à 1 000 milliards de m3.

La durée de vie moyenne d’un puits de gaz de houille va de 5 à 15 ans. Le pic de production de méthane est atteint après 1 à 6 mois d’extraction du fluide dans le gisement.

Dès le début de l’activité minière, la présence de méthane dans les mines de charbon était connue. L’exploitation du gaz de houille pour ses capacités énergétiques ne s’est toutefois développée qu’à partir de la fin des années 1970 aux États-Unis (dans les bassins de San Juan et Black Warrior).

Production américaine de gaz de houille

Données sur la production américaine de gaz de houille en milliards de pieds cubes, sachant que 1m3= 35,3 cf (« cubic feet »)

Dans le monde

Le Canada, la Chine et la Russie détiendraient à eux trois près de 80% des ressources mondiales de gaz de houille. Ce sont toutefois les États-Unis qui sont les plus gros producteurs et les précurseurs de l’exploitation de cette ressource. Le Canada est l’autre grand pays producteur de gaz de houille dans le monde avec l’Australie; l’Inde développe également un nombre croissant de projets.

La production américaine de gaz de houille a été de 49,9 milliards de m3 en 2011(1), l’équivalent de près de 7% de la consommation gazière de ce pays durant cette année ;

En Europe, des essais ont été réalisés durant les deux dernières décennies dans les principaux bassins houillers reconnus comme « grisouteux », notamment en Hongrie, en Pologne, en Grande-Bretagne et en Ukraine. La plupart de ces essais ont échoué car ils n’avaient pas recours à des techniques non conventionnelles comme les forages dirigés et la stimulation de la roche. 

En France

En France, du « gaz de mine » (capté avant il soit rejeté dans l'atmosphère) est récupéré depuis 1992 dans l’ancien bassin minier du Pas-de-Calais (à Avion, Lourches et Divion) par la société Gazonor. Ce gaz de mine est entre autres utilisé pour produire de l'électricité (cette production disposant depuis 2016 désormais d'un tarif de rachat garanti)

En Lorraine, la Française de l'énergie a déjà fait certifier 840 millions de m3 de gaz de réserves prouvées (au 20 novembre 2017), soit de quoi satisfaire la consommation gazière d'un million de personnes pendant un an selon la société.

Les bassins charbonniers présentant le plus grand potentiel en ressources de gaz de houille sont ceux situés dans le Nord-Pas-de-Calais et en Lorraine et dans la région d’Alès (gisements d’âge Carbonifère, période comprise entre - 360 et - 290 millions d’années).

Carte d'implantation gaz de houille dans les Hauts-de-France

Parmi les hydrocarbures qualifiés de « non conventionnels », les gaz et huiles de schiste ont focalisé l’attention médiatique depuis 2010. D’autres ressources nécessitant des techniques spécifiques pour être extraites présentent également un potentiel prometteur au regard des réserves annoncées. Aux côtés des sables bitumineux, des schistes bitumineux ou encore des hydrates de méthane figure en particulier le gaz de houille (dit « coalbed methane » en anglais). 

La Française de l'énergie estime que ses réserves de gaz de houille en Lorraine et de gaz de mine dans les Hauts-de-France pourraient permettre de produire l'équivalent de 5% de la consommation annuelle de gaz de la France à l'horizon 2025. Précisons que cette production gazière a toutefois vocation à alimenter les territoires voisins, cet ordre de grandeur étant uniquement employé pour donner une idée du potentiel de cette activité.

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